6 questions à un responsable sécurité d’EDF

Interview Nicolas Puebla - Responsable sécurité chez EDF

Cette année, les Journées de la sécurité routière au travail auront lieu du 9 au 13 mai 2022. À l’occasion de cet événement phare, nous sommes allés à la rencontre d’un responsable sécurité au sein d’EDF avec qui nous avons parlé sécurité routière au travail, accident, et mobilité douce.

Découvrez sans plus attendre cette interview :

Pouvez-vous vous présenter et nous dire en quoi consiste votre poste ? 

Nicolas Puebla : “Je suis Nicolas Puebla, responsable sécurité sur un site tertiaire chez EDF à Saint-Denis (93). On parle là du plus grand site d’EDF en nombre de salarié·e·s en France. Il peut accueillir jusqu’à 3 500 salarié·e·s. Je m’occupe donc de la sécurité de tous les bâtiments du site.

Responsable sécurité de EDF

Sur ce site, on retrouve tous les états-majors des activités de production d’EDF : le nucléaire, l’hydraulique, le thermique, et d’autres fonctions opérationnelles et “supports”.

Au vu de l’importance de ce site, de nombreux visiteurs viennent pour y réaliser des réunions sur un ou plusieurs jours. Avant la pandémie du Covid, on pouvait monter jusqu’à 1 100 visiteurs par jour !

Sur ce site, on va retrouver 4 grands risques :

  • l’incendie ;
  • le trajet ;
  • le plain pied ; 
  • les malaises.


Pour lutter contre ces risques, EDF met en place des actions de prévention.

Selon vous, quels sont les enjeux de la sécurité routière au travail ?

Nicolas Puebla : “On va en retrouver plusieurs que ce soit pour les salarié·e·s et pour l’entreprise.

Pour l’entreprise :

Enjeu de santé et de qualité de vie au travail
Il est primordial d’éviter que nos salariés se blessent, ce qui peut être dans les cas les plus graves synonyme de souffrance. A ce sujet, EDF est depuis longtemps engagé dans une démarche d’éradication des accidents mortels et des accidents graves. Le domaine du trajet est fortement concerné à plus forte raison en milieu urbain.

Enjeu managérial
Revenir au travail après un arrêt n’est pas forcément chose facile. A plus forte raison si l’arrêt a été long. Le rôle du manager est donc très important pour gérer ces situations et peut nécessiter beaucoup d’investissement de sa part. Il faut éviter à tout prix le “décrochage”.

Enjeu d’image de l’entreprise
EDF se veut une entreprise responsable vis-à-vis de ses salariés et tout particulièrement pour leur sécurité. Tous nos accidents sont analysés et nous en tirons un retour d’expérience pour éviter qu’ils ne se reproduisent.

Enjeu financier
Mécaniquement, plus on a d’accidents, plus ça va générer des coûts au niveau de la prise en charge médicale, mais aussi au niveau du taux de cotisations à la sécurité sociale pour l’entreprise. Gérer des personnes en arrêt de travail c’est faire face à de l’absentéisme et cela a donc un coût pour l’entreprise qui ne peut pas réaliser ses activités comme prévu.”

Les accidents de la route sont la première cause de mortalité au travail. En 2020, ils représentaient 31% des accidents du travail mortels soit 356 personnes (selon le Figaro). Selon vous, que faire pour ralentir ce phénomène ?

Nicolas Puebla : “Je pense que la clé pour faire ralentir ce phénomène c’est avant tout le comportement du conducteur sur la route et cela peu importe le véhicule qu’il conduit.
Appliquer le code de la route ne suffit pas, il faut savoir s’adapter à des situations qui peuvent être dangereuses et aux autres usagers de la route qui peuvent nous surprendre sur notre chemin.

Il faut travailler sur le comportement et les réflexes que ce soit en 2 ou 4 roues, ce qui passe par la formation et la prévention. Il faut être formé sur certaines situations précises de trajet afin d’être en mesure de réagir de manière adéquate.

On peut mettre tous les accessoires de protection que l’on souhaite, si on a un mauvais comportement ça ne changera pas grand-chose malheureusement.”

Avez-vous déjà eu en interne des accidents liés aux trajets domicile – travail / professionnel ? Si oui, qu’en avez-vous appris ?

Nicolas Puebla : “Depuis le début de l’année 2022, nous n’avons pas eu d’accident de trajet. En revanche, nous en avons connu les années précédentes. La grande majorité de ces événements sont bénins. Pour autant, en mai 2019, un de nos salariés à moto a perdu l’équilibre sur le périphérique dû à un défaut de perception en entrant dans un tunnel. 2 motos lui ont roulé sur la même jambe. Après une période d’hospitalisation et de mi-temps thérapeutique, ce salarié n’a été rétabli qu’en septembre 2021. C’est un cas d’école sur ce qui ne doit plus arriver sur le trajet pour venir sur notre site.


En 2019, nous avons également connu quelques événements avec la trottinette électrique fort de leur succès à l’époque. J’ai en mémoire l’une de nos collègues qui en sortant du métro s’est fait percuter par une personne en trottinette qui vraisemblablement regardait son portable et ne prêtait pas attention à son chemin.

Pour rappel, à cette époque il n’y avait pas encore de loi obligeant les trottinettes à rouler sur la route.”

Les mobilités douces connaissent un essor considérable avec une hausse de 42% des ventes en 2021 (selon le Figaro). Constatez-vous ce phénomène au sein de votre structure ? Quelle politique menez-vous pour sécuriser ces déplacements ?

Nicolas Puebla : “Oui bien-sûr ! On le voit pour la trottinette par exemple. Elle était déjà à la mode avant le Covid mais c’est vrai qu’après le premier confinement en 2020, on en a vu de plus en plus. De même pour le vélo qui a aussi eu un essor considérable.

D’ailleurs à ce moment-là au niveau des accidents il y a eu un pic ! Ce n’était pas des accidents très graves, essentiellement des chutes. Les conducteurs avaient besoin de pratique pour un usage quotidien de ces nouveaux modes de transport. On en vient à l’importance de la formation.

Pour répondre à cette seconde question, on a fait plusieurs actions au niveau de la sécurisation des déplacements. On peut commencer par l’agrandissement des parkings vélo et la prévention en allant directement échanger le matin avec les conducteur·rice·s à leur arrivée.

A cette occasion, on distribuait des chasubles de signalisation et dans le même temps c’était un moment de dialogue sur les difficultés du trajet. De cette manière, je suis persuadé que nous avons un impact sur les comportements de nos salariés.

On trouve toujours des stéréotypes et encore une fois ce n’est pas le véhicule qu’on utilise qui génère le risque. Pour autant, le type d’engin que l’on conduit peut préconditionner certaines dérives comportementales.

Un mauvais conducteur de voiture peut vouloir passer de force, et un conducteur de trottinette qui lui peut se faufiler va vouloir passer même quand c’est juste, ne pas s’arrêter au feu etc.

Il ne faut pas oublier que ces écarts de comportement ne dépendent que de notre volonté à vouloir se déplacer en sécurité.

En parallèle de ces actions de prévention matinales, EDF a mis en place une formation e-learning avec un kit de sécurité offert. On a aussi fait venir Two Roule pour une action de prévention pendant la pause méridienne ainsi que la société Cyclez pour faire des formations sur la conduite à vélo électrique en milieu urbain.

Pour conclure, on a au minimum 2 gros événements par an, durant lesquels on va chercher à améliorer la sécurité de nos collaborateur·rice·s sur la route, en plus des actions citées ci-dessus tout au long de l’année.”

Two Roule : Pour vous, ce type de formation devrait-il être obligatoire dans toutes les sociétés ?

Nicolas Puebla : Peut-être pas obligatoire mais ça devrait être institutionnalisé je pense. Il faudrait que le management propose un planning de formation et invite les salarié·e·s à se former en fonction du type de véhicule utilisé.

J’ai une vision assez précise de ce qui pourrait être fait. Je pense qu’il faut montrer aux gens comment se comporter et quels réflexes avoir sur les configurations dangereuses comme le rond-point, le croisement pour tourner à gauche, les angles morts, les dépassements et enfin les distances de sécurité avec les portières. Il faut aussi s’intéresser aux piétons. Personnellement, je vois régulièrement des trottinettes ou vélo frôler les piétons. Sans généraliser, on constate facilement que les conducteurs sur des engins maniables comme les vélos ou les trottinettes ne vont pas laisser la priorité aux piétons.”

Du 9 au 13 mai se dérouleront les Journées de la sécurité routière au travail : que prévoyez-vous à cette occasion ?

Nicolas Puebla : “On va sûrement faire des messages de prévention pendant cette période. Nous faisons plutôt des actions importantes lors de la Semaine de la Mobilité en Septembre et de la Semaine de sécurité du mois d’Octobre. Cette semaine de sécurité est interne à EDF ! Elle fait partie des actions annuelles que l’on met en place pour améliorer la sécurité de tous et toutes sur la route.”

Et c’est déjà la fin de de cet échange très instructif ! Il ne nous reste plus qu’à remercier Nicolas d’avoir accepté l’invitation rapidement et de nous avoir donné des réponses aussi précises.

En espérant que cet interview vous ait plu, et si vous souhaitez partager votre avis sur une thématique précise, ce sera avec grand plaisir !

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